Chemin d’acceptation et oser poser nue avec Valérie [ Interview ]

Valérie, c’est ma complice sur CurvyLink et une amie dans la vraie vie. Cela fait quelques années que je la connais, je l’ai rencontrée lors d’un tournage pour l’émission « Comment ça va bien ».
Je l’ai vue évoluer et fleurir, passer d’une femme qui n’envisageait même pas l’idée de mettre une robe, à cette femme bien dans sa peau et dans son corps, qui s’aime, se fait plaisir, est super féminine, lumineuse et de temps en temps pose dans le plus simple appareil devant la caméra.

Une transformation totale que beaucoup aimerait accomplir, une vraie réussite dans le chemin de l’amour de soi et une personne merveilleuse.
Alors j’ai eu envie de l’interviewer, car Valérie a beaucoup à partager, que ce soit sur on expérience de vie ou son expérience comme modèle nue.

1. Te souviens-tu de ta plus grande peur quand on s’est rencontré ?

Ma plus grande peur était de parler en public.

Ça allait déjà mieux qu’à une certaine époque.
Ado, je rougissais dès qu’on s’adressait à moi.
C’est quand il a fallu plaider la cause de mon fils à l’école que des ailes ont poussé, ce n’était pas pour moi que je le faisais, mais pour lui. Le jour où j’ai parlé de son trouble devant une assemblée d’une centaine de professeurs des écoles, moi qui savais un truc qu’eux connaissaient mal ou ignoraient, je n’ai plus eu peur de parler en public, je me suis sentie légitime.

Quand on a fait le shooting avec le reportage, c’est vraiment ça qui me faisait le plus peur. Mais tu as su me mettre à l’aise et de voir des femmes bien dans leur corps, c’était impressionnant et stimulant, je voulais être comme vous.

Maintenant, je n’aime toujours pas parler en public devant une assemblée, ce n’est quand même pas mon domaine de prédilection, mais je peux sortir avec des ami-e-s en participant à la conversation et pas seulement en écoutant, ou rencontrer des personnes que je ne connais pas et « taper la discut« .

2. Déclic, réflexion, instinct de survie … Qu’est-ce qui t’a décidé à vouloir changer ?

Ca a été tout un cheminement, je pense.
Le trouble de mon fils a beaucoup aidé.
Le décès de mon grand-père un boost incroyable, il avait vécu la vie qu’il voulait, je voulais faire pareil (les obsèques ont eu lieu la veille du shooting, ma mère et ma sœur m’ont poussé à y aller, je voulais annuler).
Mes fils grandissant m’ont laissé du temps pour m’occuper de moi.
Le shooting a été le déclic dont j’avais besoin pour avancer un peu plus vite. Je me suis vue dans cette robe (que j’ai gardée très longtemps), moi qui n’avais plus mis de robe depuis pfiou, je ne me souviens même plus. Je suis rentrée dedans, elle était à ma taille et je me suis trouvée jolie, féminine.

Photo de Valérie pour un tournage télé sur l'image de soi

3. Pour toi, quelle a été l’étape la plus dure dans ton chemin pour t’aimer ?

Pas facile comme question, maintenant avec le recul, tout me semble facile.
Peut-être faire le deuil du corps « parfait » (celui que la société aimerait qu’on ait toutes).
Apprendre à s’aimer, c’est faire avec soi, sans avoir à changer quelque chose.
Sans me détester complètement (je ne renierai jamais mes yeux, cadeau de ma maman et de ma grand-mère), je n’aimais pas mon corps : mon ventre qui tombe à cause de mes grossesses, mes gros bras de déménageurs, mes seins qui débordent un peu trop, mes cuisses qui ne rentrent pas dans tous les pantalons.
Et puis j’ai ouvert les yeux progressivement :
Mon ventre m’a donné 2 fils incroyables.
Mes bras me permettent de faire plein de choses et puis de toute façon, ils sont là, alors pourquoi les cacher ?
Mes seins mis en valeur détournent le regard de mon ventre, ah ah magie !!!
Mes cuisses sont musclées, grosses, mais musclées et j’adore être dans les premières quand on fait des palmes à la piscine et je ne mets plus de pantalon, ça résout le problème ^^

 » Apprendre à s’aimer, c’est faire avec soi, sans avoir à changer quelque chose. « 

Valérie curvy

4. Quelle a été ta meilleure surprise dans ton cheminement ?

La meilleure surprise a été de constater que je trouvais des vêtements à ma taille et que je pouvais porter tout ce qui me plaisait. Vive internet quand même, parce qu’en boutique, c’est loin d’être le cas.
Mais ça m’épate encore maintenant quand j’essaye un vêtement dont je pense qu’il ne m’ira pas, de rentrer dedans et de voir qu’il me va. Le dernier en date, une combinaison !!

5. Un conseil pour celles qui n’osent toujours pas la robe ?

La robe est devenue ma tenue favorite, j’en porte tous les jours, toute l’année. Je peux porter un legging en hiver et un short en été quand je vais marcher. Je viens de me racheter un jean parce que je voulais le mettre avec un top qui dort dans ma garde-robe. Mais sinon, c’est robe, robe, robe.
D’abord c’est pratique, le matin je ne passe pas du temps à chercher ce que je vais mettre, je vais devant mon placard, mes yeux parcourent mes robes et hop, je décide de porter celle-ci : pour la couleur, pour la coupe, parce que ça fait un moment que je ne l’ai pas mise, parce que j’ai envie de mettre une paire de chaussures en particulier (mon second amour après les robes)…

Une fois la robe enfilée, je suis prête, c’est quand même super pratique et rapide de se préparer le matin. Ensuite, ça ne serre pas le ventre, c’est peut-être bête comme truc, mais je n’en peux plus d’être serrée dans un pantalon alors qu’on est si à l’aise en robe.
Enfin, parce que c’est ce qui me va le mieux. J’ai appris à connaître mes atouts, à connaître les coupes qui me mettent en valeur, et je me sens jolie, belle, féminine en robe.

Si vous avez envie de porter une robe, faites-le, il existe forcément une coupe qui vous ira. Imaginez-vous, en été, votre robe virevoltante autour de vous, la chaleur du soleil, le petit vent qui vous rafraîchira les cuisses et la sensation de liberté que vous ressentirez.

6. Poser nue n’est pas une étape nécessaire pour s’aimer, mais toi tu as décidé de prendre cette direction, pourquoi ?

Poser nue n’est effectivement pas nécessaire.
Je suivais (sur Facebook) des artistes qui photographiaient tous les corps, c’était souvent des photos avec plusieurs personnes, et je trouvais ces photos magnifiques pour la diversité des morphologies. L’envie de poser est venue en regardant ces photos, mais je ne pensais pas y arriver un jour, avant qu’un des photographes que je suivais me tende la main. Un vendredi, il m’a dit : « Tu fais quoi dimanche ?« , j’ai répondu : « rien de prévu. » Il m’a dit : « et bien tu poses pour moi« .

Et là, je n’avais aucune excuse, je ne pouvais pas dire non, j’étais libre, disponible et surtout j’avais confiance en lui. Il m’a expliqué après qu’il avait compris que si on fixait une séance à l’avance, j’aurais pu me dérober, là, je ne pouvais pas (entendons-nous, on peut toujours refuser, mais j’avais envie de poser, il me fallait juste un petit coup de pied au cul pour franchir le pas).

Poser nue avec ChristPhoto
@ChristPhoto

7. Qu’est-ce que cela t’a apporté de faire ces séances photos ?

Poser nue m’a permis de prendre conscience de mon corps. J’ai choisi et fait confirmer par les photographes qu’il n’y aurait pas de retouche de mon corps donc les cicatrices, les vergetures, la cellulite, je veux les voir parce que ça fait partie de moi. Ils ont joué avec les filtres pour créer une ambiance (lugubre par exemple), jouer avec les ombres et la lumière pour mettre en valeur une partie de moi, mais c’est tout.

Je ne sais pas si tu te souviens, mais la photo tirée du shooting qu’on a fait ensemble, je l’ai adorée sur le coup, puis en regardant de plus près, j’ai vu qu’ils avaient taillé dans le gras de mon bras et mes bras étaient un complexe. Le fait qu’ils aient ratiboisé un bout de moi sur lequel je complexais, ça démontrait que j’avais raison de ne pas l’aimer puisqu’il fallait ne pas le montrer sur la photo.
J’ai demandé une photo non rectifiée que je n’ai jamais eue. Cette photo, je ne l’ai pas aimée longtemps, je ne vois plus que ce bout de bras qui manque quand je la regarde.

Je dévie, je dévie ^^. Donc c’était important pour moi qu’il n’y ait aucune retouche sur les photos, ça m’a permis de voir mon corps tel qu’il est, l’observer et le trouver beau.

J’ai pris goût à être photographiée, à sortir de ma zone de confort les premières fois et maintenant, je vais à un shooting super détendue, j’y vais pour m’amuser, c’est un passe-temps comme un autre 😀

J’ai aussi compris qu’on est tous identiques, de poser nue dans des séances de groupe permet de constater qu’on est tous fabriqués sur un même moule, alors oui, on a des différences, mais c’est ça qui est beau et enrichissant. Si nous étions tous semblables, ce serait triste et on ne se reconnaîtrait pas.

8. Si tu devais donner un conseil à une personne qui va poser nue pour la première fois, ce serait ?

  • Bien choisir son photographe en fonction de ce qu’on souhaite, aimer le travail qu’il fait, lui expliquer ce qu’on veut ou ce qu’on ne veut pas, définir si le travail sera en collaboration (gratuit, mais souvent les photographes peuvent publier vos photos sur leur site, à voir si vous le voulez ou non) ou payant.
  • Se faire accompagner si vous en ressentez le besoin, votre chéri-e, un-e ami-e, votre maman… un photographe ne peut pas vous interdire de venir accompagné-e, si c’est le cas, n’y allez pas.
  • Un photographe ne regardera pas votre corps avec un œil pervers/sexuel, il vous regarde avec un œil d’artiste à travers son appareil photo, c’est complètement différent.
  • Vous devez vous amuser lors de cette séance, même si le thème de la séance est la tristesse, la peur, l’angoisse…, entre chaque pose, vous devez vous amuser 😀

9. Quels ont été les retours sur les photos que tu as faites ?

Plusieurs retours différents selon les photos et le style des photographes.
J’ai eu des compliments, des félicitations d’avoir osé poser nue, notamment des personnes qui disent qu’elles ne pourraient jamais (et ça, c’est un boost incroyable pour l’ego) et aussi des sensations de mal-être. Je ne fais pas des photos pour me trouver belle, j’aime les univers des photographes et quand on pose en collaboration, on s’adapte à l’univers du photographe et ce qu’il veut faire de sa série de photos.
C’est comme ça que je me suis retrouvée dans la peau d’une cannibale dans un groupe de femmes avec le dernier homme sur Terre, dans un cimetière, mon corps en gros plan aplati et déformé… Ces photos-là, tout le monde ne les apprécie pas, elles bousculent.
Moi, je les adore, ça prouve que le corps, même nu, n’a pas qu’une consonance érotique ou sexuelle. Et quel que soit le style de la photo, c’est toujours moi.

Photo de Louise A. Depaume
Série « Trouble »  – Val 1 (2019) ©Louise A. Depaume 

10. Toi et la séduction, ça se passe comment ?

J’étais de celles qui pensent qu’on peut plaire à un homme (je suis hétéro, je pense que c’est pareil pour les homos) en étant ronde, mais qu’on a quand même moins de choix/chance/opportunité qu’une femme mince. Et puis, je me suis aimée, et quand on s’aime, on redresse la tête, on se tient plus droite, on se sent confiante, on ose des tenues et il se dégage un truc de vous qui fait que vous voyez les regards appréciateurs des hommes (peut-être qu’il y en avait un peu avant, mais comme je regardais mes pieds et que je pensais que ça ne pourrait pas m’arriver, je n’ai jamais remarqué).

Là, je me fais accoster dans la rue (je déteste ça souvent selon l’approche, mais c’est le lot de toutes les femmes actuellement ! Et je suis une femme comme une autre), je vois les regards et les hochements de tête appréciateurs.
Au début, je détournais le regard, gênée et étonnée maintenant je réponds par un sourire (et heureusement que tous les hommes ne prennent pas ça pour une avance !!). Je crois que mon moment préféré a été quand un homme accompagné de sa femme, mince, et de ses 2 enfants, m’a fait un grand sourire avec un regard qui en disait long. J’ai eu l’impression de gagner une bataille.

11. Y a-t-il une chose que tu n’oses toujours pas faire  ?

Je me suis demandée il n’y a pas longtemps ce que j’aimerai faire comme nouvelles choses, parce que j’ai déjà fait tellement que j’ai l’impression d’avoir réalisé toutes mes envies ou de ne pas avoir de nouveaux défis à relever, parce que je me sens bien comme je suis.
Et en fait, si, il y a encore 2 choses qui me tiennent à cœur (sûrement d’autres viendront, mais celles-ci je les ai en tête) :

  • Poser nue pour un cours de dessin ou de sculpture, il faut garder la pose plus longtemps que pour une photo, ça peut être un défi et puis j’aimerai voir le résultat d’une même pose à travers le regard d’artistes différents.
  • Aller sur une plage naturiste, je fais déjà du monokini sur la plage (chose improbable il y a quelques années), je me suis déjà baignée nue et j’adore cette sensation de liberté, j’aimerai être nue, profiter de la mer et du soleil sans avoir un regard réprobateur ou sexualisé sur mon corps et les naturistes sont tolérants et natures…

Question bonus : Un message que tu aimerais passer ?

Il y a tellement de choses à changer dans notre société, mais si les gens commençaient par être tolérant et bienveillant, ce serait déjà un grand pas en avant.

Osez être vous-même, la vie est belle, il y a plein de choses à faire, à voir, n’attendez pas d’être vieux pour vivre votre vie, ne regrettez jamais les choix que vous avez fait, ce sont des portes qui se sont ouvertes, que vous ayez apprécié ou non, vous avez appris sur vous, pour vous.
Sortez, rencontrez les gens, le monde, discutez, échangez, enrichissez-vous et ça, c’est possible grâce à Curvylink, c’est le but premier du site.

Un grand remerciement à tous les photographes qui ont croisé ma route et particulièrement au premier, Christophe Buffetrile qui a su me rassurer, me faire rire, me mettre en confiance et qui m’a donné envie de poser de nouveau.

Et Vanda Spengler, pour qui j’ai posé plusieurs fois et avec qui je passe toujours des shootings drôles malgré les thèmes improbables.

Pour en savoir plus sur Valérie : Valerie-curvy

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8 thoughts on “Chemin d’acceptation et oser poser nue avec Valérie [ Interview ]

  1. Le beau parcours d’une personne devenue aujourd’hui lumineuse.
    Merci pour ce témoignage.

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